Sur les hauteurs de Wavre, au Sud, il doit y avoir un nouvel hôpital. Au Nord, les grandes manœuvres immobilières continuent aussi. Un des derniers terrains « stratégiques » a été cédé à un promoteur chargé d’étendre le zoning menant à GSK. Cela dit, la ville de Wavre navigue à vue : elle ne dispose toujours pas d’un Schéma de développement communal.
La Bawette. C’est ici que la ville de Wavre a accepté l’extension de son zoning nord.
Gouverner, c’est prévoir. Le mardi 19 juin 2018, la bourgmestre MR de Wavre Françoise Pigeolet a relu ses classiques et elle se jette à l’eau. Cette ancienne directrice de l’administration provinciale s’engage à réaliser ce que ses prédécesseurs libéraux Charles Aubecq et Charles Michel ont omis de mettre à l’agenda dans la capitale politique du Brabant wallon, dirigée par les « bleus » depuis 1983. Juste avant le passage aux urnes, Françoise Pigeolet sort des armoires le projet d’un « Schéma de développement communal ». Le SDC ? Un outil urbanistique essentiel pour les villes qui veulent contrôler leur aménagement du territoire. Comme le prévoit le décret régional qui l’a formatté, ce document fixe des priorités, une stratégie. Il est une sorte de tableau de bord en termes de développement du commerce, des pôles de logement ou des axes de mobilité. À l’époque, la bourgmestre libérale lance un marché public pour désigner le bureau d’urbanisme qui rédigera ce SDC.
En octobre 2018, Françoise Pigeolet résiste à la déroute relative du MR aux élections communales (de 55,1 à 40,6%). Le Premier ministre Charles Michel s’en va à la présidence du Conseil européen. Et la bourgmestre faisant fonction devient effective. La Libre Belgique du 21 mars 2019 constate alors que « ça bouge à Wavre ». La ville va donner la parole à ses citoyens, écrit le quotidien. Enseignante de formation, la maïeure reconduite confirme qu’elle souhaite un schéma directeur pour son développement. « Je veux garder la maîtrise sur les décisions de l’aménagement du territoire », dit-elle. Les promoteurs immobiliers et les firmes de construction à leur service peuvent a priori ranger leurs grues. Les habitants, eux, seront consultés avant toute décision d’ampleur. Ceux qui ont les pieds dans l’eau à chaque crue significative de la Dyle doivent imaginer des temps meilleurs. Ouf !
Ouf ? Comme on le ressent depuis l’autoroute E411, Wavre s’est fortement densifiée au creux de ses deux vallons. Le bâti est serré au centre. Là, sur les deux versants, aussi, la bétonisation a augmenté à grande vitesse. L’un est orienté vers le Nord, en direction de Bruxelles, sur la rive gauche de la Dyle. Il suffit de grimper à vélo la rue Sainte-Anne pour comprendre la déclivité des lieux. C’est moins sensible via la Nationale 4 qui suit un axe parallèle et mène à la zone économique de Wavre-Nord, mais ici aussi, ça grimpe. À l’opposé, vers le Sud, les cyclistes savent qu’il faut changer de braquet en empruntant la N239 qui relie le centre-ville à la N4 vers Louvain-La-Neuve puis Namur. Cette longue côte peut vous casser les pattes si le vent souffle de face. Un peu plus haut encore, on arrive au site choisi par la Clinique Saint-Pierre pour y déménager son personnel et ses équipements actuellement basés près de la gare d’Ottignies.
Sur les deux versants, le collège communal de Wavre et sa bourgmestre soucieuse de disposer d’un outil de contrôle de la prise de décision ont assez vite démontré leur impatience. Depuis 2018, les engins de construction se sont multipliés sans attendre le fameux SDC. C’est un peu fou : en vingt ans, de 1998 à 2018, la superficie totale des parcelles bâties avait déjà augmenté de 24,7%¹.
1 Le versant Sud est donc pressenti pour le déménagement de la Clinique St-Pierre d’Ottignies. De discrètes négociations avec sa direction ont assurément commencé ou repris dès le lendemain des élections communales de 2018. En novembre 2020, la ville de Wavre a pu prendre connaissance d’un rapport d’incidences effectué par le bureau d’études namurois XMU Urbanistes, agréé par la Région wallonne. Sur un tel terrain en pente, relève ce document, le nouvel hôpital pourrait générer « un risque accru d’inondation » et une « mise sous pression » du réseau d’égouttage en cas de pluies intenses ou exceptionnelles. En juillet 2021, ce sont des pluies incessantes de cette nature qui ont fait déborder la Dyle. Mais cela n’a pas empêché la bourgmestre MR, ses cinq échevins de la même couleur politique et leur unique collègue socialiste de solliciter le feu vert du conseil communal wavrien – où la majorité peut compter sur 19 sièges sur 31 – sur ce déménagement surprenant. Sauf surprise, le nouvel hôpital devrait ouvrir ses portes en 2028 sur des terres actuellement cultivées ou boisées, pour l’essentiel. Le Domaine du Blé devra migrer vers le Nord, on y reviendra… D’autres terrains acquis par la Clinique auprès de la société immobilière Immobel pourraient plus tard permettre des développements résidentiels dans les environs immédiats.
Sur un tel terrain en pente, le nouvel hôpital pourrait générer « un risque accru d’inondation » et une « mise sous pression » du réseau d’égouttage.
Source : XMU Urbanistes, rapport d'incidences de novembre 2020
2 Sur le versant Nord, c’est la même chose. Sans en faire de publicité, la majorité MR-PS au pouvoir à Wavre a vendu en novembre 2021 le terrain réputé « stratégique » que la ville détenait aux abords du zoning de Bierges, au carrefour entre la N4 et la N257, tout proche du siège de la firme GSK et à portée de balles du golf chic du château de la Bawette. Il s’agit d’une zone à bâtir de 17 hectares, soit l’équivalent de 11 terrains de football. La bourgmestre Pigeolet a déclaré ceci, il y a bientôt un an : « Il faut renflouer les caisses de la ville. C’est pour cela que nous vendons. » Ces belles terres arborées avaient été acquises en 2008 par la ville. Elles auraient été revendues avec une plus-value de 5 millions d’euros.
L’acheteur ? Il s’agit d’un autre opérateur public, l’intercommunale inBW, où le MR et le PS occupent une position dominante depuis plusieurs décennies. Un échevin libéral de Wavre siège à son conseil d’administration. Ce CA a été présidé par la populaire Anne Masson (MR), la dauphine de Françoise Pigeolet, durant quelques mois, en 2018-2019. Jusqu’au 1er septembre dernier, le directeur général d’inBW était l’ancien député provincial MR Baudouin le Hardy de Beaulieu. Des membres de sa famille – un véritable groupe d’affaires à l’ancienne, actif surtout dans l’agroalimentaire et l’immobilier – occupent le château de la Bawette et possèdent via la société Golfinger le golf du même nom. Le patron sortant de l’intercommunale à 100% publique a toujours multiplié les casquettes. Exemple : pendant qu’il dirigeait l’inBW, il était aussi l’administrateur délégué de firmes privées, dont une société immobilière établie en Brabant wallon.
On peut dire que l’achat/revente de ce beau terrain calé entre le zoning et le golf réunissait autour de la même table diverses parties amies.
Ces 17 hectares serviront à étendre le zoning Nord de Wavre sous la forme d’une « Biotech Valley », où des PME pourront incuber au calme (enfin, il leur faudra sans doute se farcir de gros bouchons sur ces routes particulièrement encombrées). Une partie du site permettra de re-localiser le Domaine du Blé, un hôtel et une boite de nuit aujourd’hui installés là où la Clinique Saint-Pierre va migrer et où le… MR a fixé son QG festif. Joli coup : le Domaine sera choyé aux abords du golf de la Bawette. Le promoteur choisi par l’intercommunale pour piloter le projet (et engranger des dividendes) est apprécié en ce moment à Wavre. Il s’agit de la société BVI.EU, notamment désignée pour développer le nouveau zoning situé en face du parc d’attractions Walibi.
L’opposition cdH² avait été la seule à s’opposer formellement au projet de déménagement de la Clinique Saint-Pierre. Dans le cas de ces 11 terrains de football du zoning Nord, seul Ecolo a voté contre la vente de l’automne 2021. « Comment l’opérateur BVI.EU a-t-il été choisi ? Un marché public a-t-il été organisé ? Combien y a-t-il eu de soumissionnaires pour répondre à ce marché ? Quels étaient les autres ? », ont interrogé au début de 2022 les conseillers communaux Ecolo Bastian Petter et Christophe Lejeune. « Pourquoi la ville n’a-t-elle pas attendu de disposer d’un Schéma de développement communal avant de choisir l’affectation de ce terrain qui aurait pu accueillir 200 maisons avec jardin, tel que le prévoient les normes en vigueur à Wavre ? », ont-ils demandé. Avant l’annonce de sa démission pour des « raisons de santé », le 7 octobre dernier, Françoise Pigeolet n’avait pas répondu à ces questions piquantes. La nouvelle bourgmestre Anne Masson, n°2 en voix de préférence sur la liste du MR aux dernières élections et qui sera officiellement désignée le 22 novembre, n’a pas répondu à notre demande de rendez-vous. À ce stade, comme l’indique le site officiel de la ville, le bureau d’études chargé de rédiger le Schéma de développement communal n’a pas encore été désigné.
C’est le DG de l’intercommunale InBW qui a coordonné l’achat du terrain de la Bawette. En même temps, il gérait aussi une société immobilière active en Brabant wallon et sa famille contrôle le golf de la Bawette.
Comment le promoteur a-t-il été choisi ? Un marché public a-t-il été organisé ?
Bastian Petter et Christophe Lejeune, conseillers communaux Ecolo
Quand ces terres-là auront été bétonnisées et si l’on considère que le golf de la Bawette restera un espace clos, il n’y aura plus beaucoup de zones vertes le long de la Nationale 4 qui établit la jonction entre le zoning Nord de Wavre et son centre-ville. Juste sous la vallée de la Biotech, le lieu-dit Le Champ Saint-Anne est devenu le « village Matexi ». Quelque 35 hectares sont en passe d’être totalement lotis. Plus de 600 logements, à terme. Une dominante : la brique jaune ou rouge. Ces dernières semaines, les habitants de Wavre ont appris que la société Matexi voulait tracer une route pour faciliter les accès au « village ». Des hêtres majestueux du bois de Beumont semblent menacés. Cela grogne sur ce versant Nord, où les défenseurs de la nature disent avoir réuni plus de 500 signatures en quelques jours sous le texte d’une pétition critique.
« Bienvenue dans votre quartier », dit Matexi. Sur les hauteurs de Wavre, cette ville dans la ville grossit. Près du bois de Beumont, les habitants défendent leur environnement.
Du logement abordable au Val Véna ? 346 100 euros tout de même pour un 99 m².
Un peu plus bas que ce village Matexi, en bordure de la N4, le Val Véna a transformé la mini-cité chère à l’artiste Jean-Michel Folon en un luxueux domaine de maisons ou appartements d’un blanc étincelant. On y trouve un peu de logement à prix moyen. Mais aussi des appartements de 99 mètres carrés et deux chambres vendus à 346.100 euros. Un prix hors frais et auquel il faut rajouter les suppléments rendus obligatoires par le promoteur Thomas & Piron pour le garage et la cave, comme l’a relevé Le Soir Immo du 2 juin dernier, parlant d’une manière générale de « logements abordables ».
Aux bords de la Dyle, enfin, l’avant-projet de la « Rive Verte » a été présenté aux riverains en mai dernier. Sur une friche de 6 hectares, 335 logements sont planifiés. Le centre sportif de Wavre est tout proche. Ici, au moins, les candidats acheteurs auront été prévenus deux fois plutôt qu’une : les terrains de sport voisins figurent dans une zone inondable ; ils ont pris l’eau il y a un peu plus d’un an.
¹ Source : CAPRu (Cellule d’analyse et de prospective en matière de ruralité).
² Aujourd’hui Les Engagés.
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